L’incontinence menstruelle semble être quelque chose qui tombe sous le sens : on ne choisit pas quand on saigne et généralement, cela se produit sans qu’on s’y attende. Et si nous pouvions anticiper nos saignements ? C’est le principe de la technique enseignée par Mélissa Carlier, fondatrice de Cyclo Intima.
Lorsqu’on commence à avoir nos règles, on nous apprend à porter des protections périodiques afin de ne pas tacher nos vêtements. Pour Mélissa Carlier, ce n’est pas une fatalité. Kinésithérapeute spécialisée en rééducation périnéale, elle propose aux femmes des stages pour apprendre à pratiquer le flux libre instinctif. Elle nous explique pourquoi elle en est venue à cette méthode, et pourquoi elle a décidé de l’enseigner aux autres.
Le flux instinctif libre, en quoi ça consiste ?
Mais comment fonctionne cette méthode ? Celle-ci passe par des réflexes naturels et ne nécessite aucune intervention extérieure, comme l’explique Mélissa Carlier :
“C’est le fait de gérer le flux menstruel et de le libérer directement aux toilettes, plutôt que de le libérer de façon involontaire dans une serviette, un tampon ou encore une cup. Il faut bien différencier le flux instinctif libre du free bleeding qui est le fait de laisser le sang s’écouler sur soi sans mettre de protection.”
Pour cela, il est nécessaire de comprendre les phases d’écoulement des menstruations, afin de reconnaître le moment où le sang se met à couler, pour pouvoir l’évacuer à temps aux toilettes.
“On va avoir une contraction de l’utérus qui va ressortir sous forme de crampes ou de douleurs au bas-ventre, cela dépend des femmes. Donc le sang va s’écouler dans l’utérus puis dans le vagin jusqu’à sortir à l’extérieur. Entre la contraction et le sang qui s’écoule il va s’écouler plusieurs minutes, voire quinze à vingt minutes. Et donc il va s’agir de reconnaître les contractions de l’utérus et les différentes sensations pour aller aux toilettes au bon moment.”
Le but n’est pas de retenir le sang avec le périnée : cela est impossible puisque la vulve n’est pas pourvue de sphincter. Il s’agit plutôt de l’apprentissage d’un nouveau comportement.
Une prise de conscience progressive
Plus qu’une idée de confort, pour Mélissa Carlier le choix de passer à cette méthode découle tout d’abord d’une motivation écologique.
“Il y a quelques années j’ai voulu me mettre au zéro déchet et je suis passée aux culottes menstruelles. Quand je sentais le sang s’écouler je n’avais pas très envie d’aller la nettoyer, du coup j’allais libérer mon sang aux toilettes et je me suis rendu compte que finalement mes culottes n’étaient plus tachées.”
Dans un premier temps, elle ne s’est pas spécialement interrogée sur ce comportement. Par la suite, elle est tombée sur des articles traitant du sujet du flux instinctif libre, et c’est là qu’elle s’est rendu compte qu’elle le pratiquait. La méthode n’est pas magique, mais permet d’atteindre un véritable confort.
Il faut bien entendre que pratiquer le flux instinctif libre, ce n’est pas libérer 100 % du flux aux toilettes, c’est pour ça qu’on le couple au port d’une culotte menstruelle. Mais c’est d’arriver à 60 ou 70 % du flux pour améliorer le confort.
Décomplexer le rapport aux règles
C’est là qu’on touche au concept de continence menstruelle : selon Mélissa Carlier, le fait de n’avoir aucun pouvoir sur notre flux menstruel est un mythe, enseigné aux personnes menstruées dès la puberté. C’est ce qui l’a menée à vouloir apprendre cette méthode à d’autres personnes.
“Pour moi, ça a vraiment été une satisfaction personnelle de gérer ma féminité toute seule et de comprendre comment je fonctionnais. Je me suis rendu compte que c’était une prise de pouvoir pour la femme, à qui on a inculqué depuis son adolescence qu’elle était incontinente menstruelle. Pour moi c’est un mensonge, toutes les femmes ne peuvent pas contrôler leur flux à 100 %, mais elles peuvent toutes trouver du confort, ça fait partie de nous, et ce n’est pas normal qu’on soit aussi dépendantes de matériel extérieur.”
Au-delà de retrouver un certain confort, l’idée est aussi de briser un tabou : celui des règles comme une période problématique, gênante qu’on subit plus que l’on ne la vit. Une période qui pour elle a changé du tout au tout lorsqu’elle a réussi à prendre le pouvoir sur ses règles.